À [JE / NOUS]

AVANT PROPOS :

Comment ne pas éprouver le poids de notre époque ? Le poids de structures stagnantes nous précipitant vers la fin de notre civilisation si évoluée. Le poids de l’utopie au seuil où la faune et la flore disparaissent plus vite que la mélodie des touches de clavier de notre empire informationnel. Le mot utopie est devenu un simple adjectif qualifiant les délires irréalistes d'une jeunesse rêveuse. Il est désormais dépossédé de son sens primordial; l'espoir d'un idéal concret et réfléchi. Le constat de la structure de l’individualisme que Tocqueville dressa sur la démocratie américaine n’a que guère évolué¹. Le cercle social que crée l'individualisme n'est plus un déterminisme sociologique, mais un ensemble de valeurs ancrées, défendues et brandies tel un étendard. Comment ne pas éprouver le poids de la complexité moderne ? Elle forme un nœud si compact qui nous laisse sans grand espoir. Ressentir de l’empathie ne serait que se pousser au bord du précipice de la lucidité. Dans un monde où l’esthétique des produits de consommation ne plaît qu’à l’œil, dissimulant une foule de parades vide de sens qui entretient une machine aliénante ô combien lointaine et proche à la fois.

Nous réalisons grâce aux industries du cinéma, du jeu à la télévision, le fantasme de la mort de notre civilisation. Tantôt une épidémie nous fait la grâce d’être malthusienne, tantôt les éléments de la nature se retournent contre nous pour calmer la soif parasitaire de notre condition d’humain.

Nous restons dans l’incapacité de modifier un système électoral si bien ancré où le sens des mots a changé pour ne pas déstabiliser un système économique qui pourrait préserver les anciennes puissances. Que pourrait-on répondre à Guy Debord, en constatant que la première industrie mondiale du divertissement actuelle est le jeu vidéo ? Nous parcourons la toile de nos réseaux avec ardeur, contemplant le narcissisme des intimités en périphérie. Nous constatons jour après jour que les idéalismes de la communication se transforment en labeurs digitaux².

Le besoin d’empathie :

Le terme empathie a été créé en allemand ( Einfühlung, « ressenti de l’intérieur ») par le philosophe Robert Vischer en 1873 pour désigner l’empathie esthétique, le mode de relation d’un sujet avec une œuvre d’art permettant d’accéder à son sens.

Le concept d’empathie a bien évolué depuis sa création, la psychologie, la psychanalyse, la neuroscience se sont emparées de ce concept. J’ajoute à cela ma définition :

L’ empathie chez l’humain pourrait être la tentative de concevoir l’extériorité de notre esprit. C’est un mouvement, un aller-retour entre l’idée d’une chose et soi.

Cette définition englobe, l’empathie comportementale, physique et émotionnelle. Ses modalités sont diverses selon le contexte. Cette définition tente de concevoir la structure et le mécanisme de l’empathie et non ses applications que nous experiençons tous les jours. La déclaration de Barbara Kruger dans l’espace public de Strasbourg « L’empathie peut changer le monde » en 1994 est touchante et utopique. Elle est pourtant l’affirmation d’une source de pouvoir que nous pouvons utiliser comme moteur de changement. Ce moteur dépasse les conceptions de professions et de champs d’actions. C'est pour cette raison que Jeremy Rifkin, économiste et conseillé pour de nombreux gouvernements, peut lui aussi nous parler d’avènement de l’âge de l’empathie.

L’extension de l’empathie à tous les êtres vivants est un important jalon pour l’espèce humaine. Si le mouvement de défense des droits des animaux n’en est qu’à ses débuts, c’est peut-être un signe avant coureur de l’avènement de l’âge de l’empathie.³

L’empathie contemporaine est tout à fait unique puisqu’elle est la conséquence de nombreux enjeux pour notre système capitaliste. L’enjeu économique et politique premier est d’entretenir une distance morale avec les objets possibles d’empathie. Elle est particulière car elle est prise en considération dans le marketing, la publicité et sur le plan politique.

Plusieurs procédés sont à l’œuvre. Au sein du langage par exemple, la viande de l’animal ne porte pas le même nom que l’animal lui même. Dans le langage médiatique avec de nouveaux mots comme « Frappe chirurgicale, guerre propre, plan de sauvegarde de l’emploie », la positivation du langage, poncif orwellien est un des fondements de la langue de bois et de la science des relations publiques. De la même manière des produits chimiques néfastes peuvent porter de nombreux noms pour designer le même produit. L’amendement français CL158 voulait remplacer le mot vidéosurveillance par videoprotection par exemple dans l’ensemble des textes de loi. Historiquement l’industrie du tabac synthétise très bien ce travail de la langue avec les « Torch of Freedom » des années 1920. Des femmes payées par l'industrie du tabac paradaient cigarette en main comme un symbole d'émancipation féministe. Dans la grande distribution les conditions de création des produits doivent être le plus confidentielles possible pour le consommateur. L’industrie de la viande ne peut se permettre que l’élevage intensif et ses modalités soient transparentes, aux risques de perdre des consommateurs. Des stratégies commerciales classiques et efficaces. De même que le traitement de l’information par les médias généralistes tient compte de La loi du mort-kilomètre. La logique implicite et nécessaire est de cultiver la distance avec ce qui pourrait faire l’objet d’empathie qui à terme modifierait la structure déjà en place. L'empathie fait l’objet d’un traitement tout à fait spécial puisqu’elle permet aussi de manipuler l’opinion sur divers sujets sociétaux. Sur le plan technologique, les travaux de la chercheuse Laurence Devillers au CNRS sur l’empathie des robots sont remarquables. Elle imagine des robots qui participeront aux soins des personnes âgées, à l’analyse des émotions humaines, leurs classifications et peut être leurs prédictions. Effrayant et attirant à la fois, ses recherches posent de nouvelles problématiques sur l’implication de la technologie, de la robotique dans les relations humaines et celle que nous développons avec les machines. L’empathie est selon moi une pierre fondatrice pour améliorer le monde, elle est la force sympathique qui amène à l’amélioration du commun.

Comme chaque utopiste intègre, la recherche d’un monde meilleur pour l’ensemble du vivant de notre planète est une préoccupation qui donne du sens. Tenter de comprendre notre monde, ses articulations, ce qu’il est aujourd’hui et ce qu’il sera demain est essentiel. Évoluer dans un monde d’interdépendances abstraites en tant qu'artiste est un défis. Le consumérisme ambiant, l’apologie permanente de la technologie en omettant ses paradoxes ne nous donne que peu de place pour recontextualiser et agir face à ce qu’on estime réellement problématique. L’utilité des vieilles structures dominantes se pose-t-elle encore ? Des problèmes abstraits pour des conséquences concrètes. En regard des enjeux principaux de la société d’aujourd’hui par rapport auxquels l’empathie est pour moi un concept pertinent et productif pour relever leurs défis, il faut aussi situer l’empathie, ou plutôt cette mise-en-œuvre de l’empathie comme praxis sur le terrain d’une recherche utopique.

SENSATION D’UBIQUITÉ :

Il peut nous arriver parfois de prendre un certain recul sur le présent. Il y a des années alors que j’étais assis à attendre sur un banc, l’esprit ailleurs, les yeux se baladant dans mon environnement proche, j’attendais. C’était un matin, le jour du marché des fruits et légumes. L’atmosphère était humide et imprégnée du parfum des travailleurs de tout ordre partant pour leur journée de travail. Il peut arriver dans ces moments là que l’on prenne une posture d’observateur face à nous même et au lieu que l’on expérience. Ce qui nous amène à avoir un certain recul mental et spatialisé où l’on se perçoit non pas par ses sens, mais par l’idée d’un tout, d’une multiplicité. Comme si l’on regardait une carte de la scène que l’on vit. Le mouvement imperturbable de la réalité d’une machine qui nous dépasse. Les bruits incessants formant une masse hétérogène dont la source n’est pas localisable. Une sensation d’ubiquité.

C’est la sensation d’un tout, d’un va-et-vient entre l’abstraction d’une réalité trop complexe pour être intelligible et la condition de notre nature d’être physique et biologique.

C’est ce que le chercheur acousticien et urbaniste Pascal Amphaux pourrait appeler les effets d’ubiquité, la forme sensible d’un ensemble de conditions physiques et acoustiques qui nous approche d’un effet d’ubiquité. Dans l’étude acoustique du son, les effets d’ubiquité sont caractérisés par la délocalisation d’un ensemble de sons mais qui pourrait être repérable dans le cadre où l’on se trouve. Les effets d'ubiquité sont selon moi l'apparition d'un " mouvement empathique". Un mouvement de notre perception mentale de nous même vers la représentations imaginaire d'un monde. Et de cette imaginaire à nous même. Ce mouvement est peut être ce qui amène à l'empathie.

Au delà de l’étude physique de cet effet il est intéressant d’essayer de le percevoir comme une manifestation physique d’un mouvement dans un espace mental. En effet il est possible que ces effets d’ubiquité prennent comme source un déplacement de notre perception soutenu par certaines conditions. Il est alors utile d’examiner ce phénomène et ses articulations par les structures qui peuvent le supporter et possiblement créer son apparition. En cela, l’informatique et les nouveaux médias électroniques sont d’une richesse trop peu explorée. Ces chemins se définissent forcément dans un contexte complexe entremêlé de jeu de domination, de politiques structurelles, d’histoire et d’oppositions. L’émergence du réseau internet est un terrain propice pour explorer ces chemins. Plusieurs questions restent centrales pour moi. La forme sensible de cet effet d’ubiquité peut-elle amener à créer l’empathie ? Peut-on assister à l’émergence de nouvelles formes d’arts ubiquitaires ?

Nous connaissons actuellement trois grands types de réseaux informatiques, centralisés, décentralisés et distribués. Je conçois plus largement ces structures comme des concepts qui structurent l’information et qui nous permettent de concevoir leurs implications dans notre monde contemporain. Ces structures peuvent être concaténées ou parallèles, mais elles possèdent toutes des schèmes de pensés, d’articulations politiques sous-jacentes ainsi que des formes de domination. À travers l’exploration de deux structures qui s’opposent, centralisée et décentralisée, j’essaye d’explorer le contexte et les conditions qui permettent l’apparition des effets d’ubiquité et des mouvements empathiques.

RÉSEAUX CENTRALISÉS :

La structure centralisé est aussi vieil que le monde, nous l'éprouvons depuis notre naissance. Elle est le fondement de nombreux concepts politiques aristocratiques, ploutocratiques, monarchiques et corporatistes. C’est la forme de domination la plus simple et directe. Barbare, elle fait frémir notre cerveau reptilien, le darwinisme social légitime cette domination du fort sur le faible comme loi immuable et universelle. Elle est typiquement d’une orientation verticale. La hiérarchie par exemple est fondée sur ce principe. Une autorité descendante exerce son pouvoir sur et vers un ensemble de nœud. Elle permet d’avoir un contrôle beaucoup plus simple des nœuds qui lui sont attachés et les premiers réseaux informatiques suivaient ce modèle. Sur le plan guerrier, la structure centralisée est terriblement efficace.

Un certain nombre de schémas sont possibles grâces aux structures centralisées, la rapidité de délégation aux structures inférieures, le contrôle beaucoup plus simplifié par le nœud dominant. L’information y est descendante. La plupart des modèles politiques ont suivis ce principe depuis des siècles, que cela soit d’une autorité religieuse, royale ou bourgeoise. La création de la démocratie moderne en Amérique basée sur un système électoral est tout à fait intéressante sur ce plan puisqu’elle confronte deux types de structures.

Les systèmes électoraux relèvent du régime oligarchique puisque nous votons pour nos représentants. Le pouvoir est délégué, et ce petit nombre de personnes exercent le pouvoir par la suite. Hors le principe de la démocratie à son origine, la démocratie Athénienne, n’était pas basée sur un régime électoral. Les citoyens exerçaient le pouvoir. Il n’est pas question ici des problèmes du système de la cité d’Athènes où les femmes et les non-citoyens n’avaient pas de droit démocratique. Il est question de l’exercice du pouvoir horizontalement. Les pères fondateurs du gouvernement américain étaient contre l’émergence d’un pouvoir démocratique. C’est pour cette raison que durant un demi-siècle un travail sur le sens des mots a été fait pour permettre de concevoir un système démocratique comme un système électoral. Il y avait en jeu le choix d’une structure qui permettrait le contrôle par une élite dirigeante tout en étant le symbole d’une forme de progrès. D’un coté la structure décentralisée de la démocratie et de l’autre la centralité d’un régime électorale. Johns Adams sur la démocratie déclara une phrase célèbre sur la question :

L’idée que le peuple est le meilleur gardien de sa liberté n’est pas vraie. Il est le pire envisageable, il n’est pas un gardien du tout. Il ne peut ni agir, ni juger, ni penser, ni vouloir.

Cette structure est extrêmement stable, car après un travail de propagande de fond, elle est considérée comme la garantie des libertés individuelles, ainsi que le système qui donne le pouvoir au peuple. Mais la délégation du pouvoir est toujours une forme de domination. Les modalités et l’apparition des structures centralisées sont en mouvement, les contextes changent et s’adaptent mais l'essence n’est pas remise en cause, elle prédomine et participe aux développement des individus à l’intérieur. La circulation de l’information ici est descendante et les médias, les journaux et la télévision reflètent cette domination structurelle. L’ information de plus en plus rapide est alors filtrée par des instances qui défendent leurs intérêts ainsi que leurs propres idéologies. De nombreux systèmes et de nombreux concepts se calquent parfaitement sur cette structure. Notons par exemple l’anthropocentrisme où l’humain est placé en haut de la chaîne alimentaire qui exerce sa domination sur le vivant. Système pyramidale qui légitime la position centrale de l’humain dans sa conception dualiste entre Nature et Culture. Schème qui illustre comment le vivant peut nous être utile ou non, basé sur la relation que l’on entretient avec ce dit vivant. Les théories fonctionnalistes de Talcott Parsons suivent ce même schéma et légitime la hiérarchie et les enjeux de domination¹⁰.

Les modalités de création artistiques ont presque toujours suivis la structure qui les contenaient. Les systèmes centralisés où le pouvoir était de l’ordre religieux par exemple, amenaient à une création religieuse. Pouvoir et culture ont toujours été lié par une soumission aveugle ou forcé. Mais qu'en est-il lorsqu’une structure d’une nature différente nous influence et change les modalités du pouvoir et de la culture ?

L’émergence d’une structure décentralisée depuis quelques décennies est un phénomène particulier qui influence obligatoirement notre société et son fonctionnement. Avec elle de nouvelles valeurs, de nouveaux mouvements ainsi qu’une nouvelle conception de notre propre personne au sein de notre environnement émerge.

RÉSEAUX DÉCENTRALISÉS :

L'architecture décentralisée est une forme d'organisation où de nombreux nœuds sont interconnectés et ne disposent d'aucun point central. Les liens sont hétérogènes et mouvants. Si une autorité souhaite contrôler les flux d'informations de cette structure, elle doit d'abord faire converger l'information vers un point centrale. C'est une tâche fastidieuse et complexe. La décentralisation du pouvoir qu'induit cette structure est le fondement des idéologies du communisme libertaire. Idéologie longtemps défendue comme un excellent contre pouvoir car elle permet la diffusion à grande échelle de l'information. Internet et sa partie visible, le web, reposent sur cette architecture. Ce n'est pas un hasard si le réseau mondial repose sur cette structure, elle permet d'interconnecter plusieurs réseaux non hiérarchiques.

Lors de sa conception, internet était utilisés et développés à des fins militaires. L’agence ARPANET développa grâce à Vinton Cerf le protocole TCP-IP qui posa les fondations techniques d'internet. C’est-à-dire l’échange de paquets d’informations entre différents serveurs et clients d'un ensemble de réseaux interconnectés. La création de ce réseau mondial peut être actée par l’ouverture de ce protocole au monde civil qui a permis l’évolution que nous connaissons tous. C'est-à-dire l'avènement d'une nouvelle économie mondiale de la société de l'information. Malgré cette économie, les artistes et ingénieurs du début des années 1980 ont vu dans cet espace virtuel la possibilité d'une utopie.

Le cyber-espace est né dans ce contexte. Un monde possiblement infini où tout est possible. Les acteurs contestataires de ce nouveau monde se sont qualifiés de cyber-punk. Contextuellement c’est l’échappé virtuelle des perdants idéologiques. Une réponse induite par l’incapacité à changer le monde réel dans la société de l’information. C’est aussi l' ouverture d’un espace qui pourrait dans un avenir hypothétique modifier les structures en place. Plus doux que le Neo-luddisme¹¹ des années 1990 et extrêmement compatible avec l’évolution de la société de l’information.

Le collectif VNS-Matrix et leur Manifeste cyberfeminist pour le XXIe Siècle¹² démontre de l’intérêt de ces nouveaux espaces pour les causes libertaires. Tout comme John Perry Barlow et sa déclaration d’indépendance du cyber-espace en 1996 acte cette idée d’appropriation. Depuis des années le modèle décentralisé est pour beaucoup l’avenir de ce que devrait être la structure régissant le pouvoir, mais le modèle d’internet est loin de démontrer le succès de la structure. Une loi structurelle semble émerger avec le temps.

Si une structure est comprise dans une structure d’une autre nature, elle tend à s’accorder vers l’architecture de la structure dominante.

Internet est porté par le système capitaliste et la révolution de la micro-informatique, son succès est intimement lié aux profits possibles sur ce média. Voir et défendre internet sur ses aspects libertaires qui permettent la libre diffusion des informations et de la communications ne serait que voir le bon coté des choses. Ce réseau a permis l’émergence d’une dynamique aliénante dans le travail mais aussi de risques extrêmement rapides sur le plan économique, écologique et géopolitique.

Les Printemps Arabe par exemple illustre la force des réseaux sociaux dans la déstabilisation des gouvernements. Les campagnes de propagandes de robots autonomes sur les réseaux sociaux¹³ peuvent nous apprendre quant à eux l’intérêt que porte les gouvernements à l'égard des nouveaux médias dans la fabrique du consentement. La surveillance généralisée par la NSA qui a été exposé par Edward Snowden¹⁴ démontre les enjeux idéologiques qui sont au cœur de l'informatique moderne. Paul Virilio affirmait si le temps c’est de l’argent, alors la vitesse c’est le pouvoir. La surabondance d’informations, de sollicitations et de socialisations sont les symptômes de cette vitesse¹⁵. Nous savons maintenant les retards mentaux que la technologie provoque, les déficits d’attention d’un monde interactif et esthétique, les burnout. Nous commençons à peine à légiférer sur ces questions comme avec le droit à la déconnexion.

Cette nouvelle économie a fait apparaître des géants tentaculaires. Les GAFAM ( Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft), ces géants qui dominent toute l’industrie de la production à la diffusion du support qui les a fait naître. On ne peut apercevoir la fin de la longue chaîne des entreprises qu’ils possèdent et contrôlent. C’est l’émergence de ces multinationales qui précipite la structure décentralisée vers une architecture centralisée puisque les utilisateurs se cantonnent maintenant pour la plupart, à l’utilisation de leurs services et filiales. Ce qui a pour conséquence de déstabiliser plusieurs fondement du réseau internet.

La pluralité et la neutralité sont la force d’Internet. C’est pour cette raison que le minitel en France n’a pas résisté à l’assaut d’internet. Sa structure centralisée rendait son utilisation et son évolution linéaire sans grands intérêts sur le long terme. Benjamin Bayard, co-fondateur de la quadrature du net¹⁶, met en garde depuis plus d’une décennie sur le danger qu’internet devienne une forme de minitel. Si les routes que nous empruntons sur le réseau sont taxées, si la carte n’est pas complète, alors qui pourra affirmer que tel ou tel contenu mérite sa place sur nos écrans ? C’est le combat de la neutralité du Net, principe qui régit l’égalité dans le traitement des informations sur le réseau internet sur le plan technique. Toucher à cette égalité induit de toucher aux fondements du réseau internet.





































CONFLIT DE STRUCTURE :

La société post-internet connait un conflit inhérent aux structures qu'elle utilise. La décentralisation du réseau est en permanence menacée par des acteurs du monde économique et politique. Des législations tentent depuis des années de contrôler ce média jugé trop libertaire. Si cette structure n’a toujours pas totalement sombré, c’est grâce à une lutte permanente depuis ses débuts entre l’invention de technologies non propriétaires et la centralisation d’instance répondant de mieux en mieux aux demandes des utilisateurs. Le paradoxe de ce réseau est d’être le bras imperturbable de la nouvelle économie tout en étant un symbole de liberté. Le collectif Critical Art Ensemble a formulé ce paradoxe dans un texte nommé « les promesses utopiques »¹⁷. Ces promesses nous expliquent qu'une des conditions de la stabilité de ce conflit structurel réside dans la promesse d’une révolution sociale qui n’arrive jamais. Une révolution brandit sous l’étendard de la liberté par les acteurs majeurs du corporatisme d’internet, mais aussi des technophiles de tout ordre, engagés dans de nombreuses luttes ainsi que dans le développement de logiciel open-source. Ce sont pour moi les promesses d’une structure qui nie les modalités de son propre déploiement, fondée en tout premier lieu pour un meilleur commandement militaire. L’aspect le plus subtile et le plus dur à percevoir tant Internet est la source de si belles valeurs, relevant d’un culte techno-utopiste dissimulé sous les philosophies californiennes new-âge de la Silicon-Valley¹⁸.

Une des plus grandes caractéristiques de notre époque est sans doute que nous sommes dans la société de l’information où les technologies et la communication jouent un rôle essentiel pour que la machine reste sur les rails. La fracture numérique est une conséquence direct de cette société à deux vitesses et dans la société d’abondance occidentale nous goûtons avec enthousiasme à l’informatique Ubiquitaire, troisième ère de l’histoire de l’informatique. Nous consommons un ensemble d’objet dans notre quotidien qui nous permettent d’être reliés en permanence à différents réseaux. Peu d’espaces restent vierges de ces appareils, l’information est disponible partout et à chaque moment. Les appareils électroniques deviennent connectés et les comportements que nous devons exercer sur ces objets deviennent à leurs tours réduits et faciles d’accès. Leurs affordances terriblement efficace nous permet de trouver en eux une attractivité au point d’en faire des modes. Cette économie évolue vers l’hyper-connectivité de ses utilisateurs et des appareils entre eux. Les processeurs sont de plus en plus petit et avoir une machine à laver connectés au réseau qui nous avertie de la fin du lavage de notre linge est loin d’être de la science fiction. La disparition de notre champs de vision de ces ordinateurs est en marche, les modules connectés sont déjà en place dans beaucoup de secteur de l’industrie. Des travaux qui ont étudiés ces questions et tentés de créer des systèmes pouvant se démultiplier, s’interconnecter et se greffer à d’autres systèmes existent depuis les années 1960. Les puces RFID en sont un exemple populaire adopté massivement par de nombreux industriels. Nos réseaux, nos cartes bancaires, nos écouteurs audio sont maintenant sans fil. Nous pouvons mesurer l’humidité de nos plants de tomates pour les arroser automatiquement selon la saison. Toutes ces choses forment l’informatique Ambiante, aussi appelé l’Ubimedia par Adam Greenfield¹⁹.

Naturellement dans la société de l’information il faut que l’informatique s’accorde avec la multiplication des données. L' omniprésence de ces données et de ces capteurs doivent être soutenu par une informatique qui les rendent opérant. Une informatique tentaculaire qui s’immisce avec subtilité dans nos quotidiens. L’attrait est énorme tout comme les risques que cette informatique peut amener politiquement. Nous pouvons constater ces risques de nos jours en Chine par exemple où la nature du pouvoir permet de mettre en place ces systèmes beaucoup plus rapidement. Le système de "score citoyen" est redoutable. Selon ce que vous consommez, vos habitudes, vos relations, tout ces paramètres soutenus par un système de vidéoprotection généralisé permet un contrôle redoutable des citoyens. De bons points sont donnés au bon citoyen. En fonction du score, des privilèges sont ainsi attribués. Ce sont ces applications sociales qui sont intéressantes pour imaginer les dérives que de telles technologies permettent. Les technologies informatiques sont politiques, l’adaptation d’une certaine technologie plutôt qu’une autre peut avoir des conséquences désastreuses et des implications sociales presque impossibles à prévoir.

Prenons les normes textuelles par exemple, l’adoption d’un encodage (traduction) textuel ou d’un autre implique d’imposer un ensemble de caractère à défaut d’un autre. Ce qui pose tout de suite problème à l’ensemble des langues ayant des caractères avec accents, des Kanji, Katakana, l’alphabet cyrillique. L’adoption de l’Unicode a fait perdre d’office un ensemble de caractères historiques à de nombreuse cultures sur le plan numérique.²⁰

Il y a dans la beauté de ce chaos des espaces libertaires qui ont su tirer partie du modèle décentralisé d’internet. Le développement du système d’exploitation Linux ouvrit la voie sur ce point. Linus Torvald a développé Linux en collaboration avec un millier de développeurs aux quatre coins du monde, une forme d’organisation proche du chaos que S.Raymond²¹ opposa par la suite sous le nom de cathédrale et de bazar. Cette opposition métaphorique parle exactement des structures décrites au début de ce texte. Depuis toujours le développement informatique obéissait à un développement descendant extrêmement hiérarchique semblable à une autorité religieuse corporatiste. L’apport le plus précieux du logiciel-libre ne réside pas dans un système d’exploitation massivement utilisé dans le monde entier même si la plupart des serveurs utilisent ce système pour nous proposer des sites internet. Il ne réside pas non plus dans les milliers de logiciels libres de droits disponibles partout sur la toile. Il réside dans l'apport d' une philosophie et d'une méthode d’organisation horizontale, cette méthode d’organisation chaotique repose essentiellement sur une philosophie libertaire et démocratique. Les défenseurs de cette philosophie se retrouvent aisément de nos jours, les Cypherpunk²² en tête avec deux de ses représentants célèbres que sont Julian Assange²³ et Jacob Applebaum²⁴. Le développement de la cryptographie est presque entièrement bâti par des acteurs du monde du logiciel libre qui avaient peur des dérives totalitaires que pourraient permettre ces technologies. Richard Stallman créateur du logiciel libre est une des premières personnes a avoir créer un logiciel pour récupérer les mots de passes des gens sur le réseaux, tout en leurs disant de militer contre l’utilisation de systèmes qui pourraient se retourner contre nous.

Beaucoup de penseurs voit dans le cyber-espace un eldorado pour inventer le monde de demain, Roy Ascott parle de nouvelle conscience qui amènera à une évolution spirituelle sans précédente²⁵. Bien que tenté par ce type d’affirmation optimiste sur le pouvoir de notre réseau mondial, il est plus simple pour moi de voir cette espace comme un champs de bataille idéologique reflétant très bien le monde qui ne lui est pas vraiment extérieur. Son influence n’est pas nulle pour autant.

L’ influence d’une structure décentralisée sur les générations qui ont grandi à l’intérieur permet en partie d’ouvrir au monde. En sociologie, la seconde socialisation qui amène à chercher des influences extérieures au cercle proche de la famille et des amis permet cela.Il est évident que les adolescents utilisent massivement internet et dire que cela n’aurait aucun impact au delà des influences néfastes de l’utilisation des réseaux sociaux serait réducteur. L’hyper-sexualisation est une des formes les plus visibles de ces phénomènes.

Ainsi toute une génération conçoit le monde, d’une manière beaucoup plus large que la génération précédente, pas par altruisme ou par compassion , mais par la consommation permanente du réseau et des produits qu’il engendre.

L’information sur le réseau est importante évidemment mais les propriétés du réseau sont encore plus importantes, par exemple : la pluralité des nœuds offre la possibilité de mettre en relation les informations et de les comparer à un niveau inégalable. La communication en temps-réel a permis à toute une génération d’être formée aux débats, exposer ses idées et être remis en cause par autrui, pousse à travailler la pensée.
Mais une des propriétés les plus importantes, selon moi est la globalité du réseau, un réseau mondial renvoie en permanence à concevoir un tout, la multiplicité de la représentation d’un monde en mouvement, c’est une structure mentale tout en étant un mouvement vers autrui. Le réseau nous renvoie toujours vers un ailleurs qui n’est ni un lieu, ni un non lieu. Cet entre deux laisse place à la tentative de concevoir la multiplicité d’une abstraction qui relie presque toute notre planète. C’est ce que j’appelle un mouvement empathique. Si l’empathie est un état alors le mouvement empathique est l’échange qui peut amener à cette état pour permettre de concevoir la multiplicité de notre monde. Tenter de concevoir le réseau est une aporie en soi puisqu'il est inquantifiable et possiblement infinie et changeant. Le mouvement empathique se suffit à lui même tout en étant distinguable dans énormément de production artistique contemporaine et particulièrement dans l’art en temps-réel où il trouve sa forme la plus explicite.

Le réseau sensible.

« The Ubiquitous telepresence project » de l’université du Colorado de 1998 où des chercheurs développèrent un projet de robots autonomes est un dispositif qui donne des pistes de compréhension pour voir quels mécanismes se jouent avec ce que l’on appelle l’ubiquité informatique. Ils devaient être disséminés dans le monde entier et grâce à des caméras, permettre l’expérience de l’ubiquité informatique pour vivre une « WorldWide expérience ».

L’expérience du corps ici est tout à fait banale, nous ne bougeons pas mais un dispositif visuel nous permet de contempler plusieurs espaces et plusieurs réalités en temps-réel. Le mouvement emphatique ici est direct, nous percevons une multiplicité et faisons l’expérience de cette multiplicité proposée. Cela montre simplement que ce que nous considérions à l’époque comme un dispositif ubiquitaire était l’énumération visuelle ou auditive en temps-réel d’espaces reliés par le réseau informatique. L’effet d’ubiquité est grossier et forcément efficace. Ce qu’il y a de plus intéressant dans cette proposition, c’est la relation que le public noue avec l’expérience et le mécanisme qui est en jeu quand il cherche à concevoir ces différentes réalités.

De nombreuses productions proposent ce mécanisme, Bitnik et l’installation Random Darknet Shopper est exemplaire de ce point de vue. Un simple programme informatique autonome (Bot) dispose de cent dollars pour effectuer des achats aléatoires sur le sous-réseau d’internet, le DeepWeb (Tor)²⁶. Par la suite la galerie reçoit les différents produits commandés et les mets sous verre.

Sur un autre registre, l’installation de Julian Oliver à la Transmediale de 2014 est tout aussi pertinente, PRISM: TOWER. Le détournement du réseau GSM (téléphone mobile) par les ondes, permet la mise en perspective de dispositif que l’on utilise au quotidien et des forces silencieuses qui exploitent ce réseau. Il n’est pas étonnant que les autorités aient dû intervenir pour couper cette partie de la pièce. Utilisé dans le domaine militaire ainsi que par des gouvernements dictatoriaux dans le monde entier et par des agences de publicité illégales, un procédé comme celui-ci peut vite devenir problématique et porte en lui tout un symbole concernant la protection de la vie privée des usagés.

La communication et le réseau ont une base commune, une base relationnelle. Les œuvres dont je viens de parler, désignent avant tout différentes formes de relations et c’est leur plus grand intérêt. Lorsque Fred Forest crée les robinets planétaires, il expose les nouvelles relations d’une époque. Le dispositif est simple, un téléphone est relié a une électrovalve qui s’active pour laisser l’eau couler lorsque des gens appellent ce numéro. Un seau se remplit au fur et à mesure du temps. La simplicité du propos est d’autant plus efficace, le dispositif ici est secondaire. Le sujet reste l’ensemble des personnes activant le dispositif par téléphone, leurs relations et leurs actions à distance. Le mouvement empathique se matérialise à chaque fois que de l’eau s’écoule, imaginant qui et d’où la personne active le robinet.

Ces différentes formes ubiquité informatiques proposent toutes un dispositif qui hérite des propriétés du réseau sur lequel elles reposent.

De ce geste simple naît l'exposition. L’aspect sociologique est d’une force incroyable, dressant au fil des jours une représentation aléatoire des pratiques entre acheteur et vendeur œuvrant sur le DeepWeb. La globalité, propriété du réseau où le bot fonctionne permet de concevoir ces différentes réalités. Blacklists du collectif Disnovation est une édition qui énumère un ensemble de sites internets censurés pour différentes raisons. Sous la forme d’une encyclopédie en treize volumes, cette pièce dresse des représentations du monde entier par l’angle de la restriction pour des motifs propres à chaque pays. Cette énumération figée d’une structure mouvante et sans fin, propose une forme d’ubiquité dont le ressort du mouvement empathique est l’énumération, donnant, lors de la lecture, le vertige des mœurs et coutumes des acteurs utilisant ces systèmes de filtrations et de censures.

Dans un registre plus visuel et formel, la série de jeux de Simon Denny propose d’établir, aux travers différents jeux de plateau, l’ensemble des acteurs et enjeux des dernières innovations de la BlockChain²⁷. Système de chiffrement qui fonde la technologie des crypto-monnaies sur un réseau distribué. Cette série d’œuvre terriblement techniques et ludiques est aussi un détournement des figures qui illustrent l’histoire de cette technologie et les différents paradigmes des acteurs de ce milieu: allant des anarchistes utopiques peuplant des microcosmes du web, aux startup cherchant de nouveaux systèmes autogérés et décentralisés dans un libre échange plus féroce que le libéralisme que l’on connait déjà depuis des années.

Ces exemples d’œuvres ont pour vocation de démontrer la présence du ressort ubiquitaire qui joue un rôle dans ces pièces et tente d'élargir la conception d’ubiquité informatique.

Nous concevons l’ubiquité informatique par l’énumération et la superposition, comme nous concevons le multi-tâche et le problème reste le même dans les deux cas. Nous sommes incapables de faire deux choses en même temps et nous sommes incapables de créer de l’ubiquité. Les effets d’Ubiquité peuvent se concevoir par la relation transitive inhérente au réseau au delà de l’énumération et de la superposition. L’acte devient le vecteur le plus important pour faire apparaître le mouvement empathique. Si nous prenons par exemple le mouvement des cordes sympathiques en musique. Sur un instrument de musique à cordes, les cordes sympathiques sont des cordes libres sur lesquelles on n’exerce aucune action, mais qui entrent en vibrations par simple résonance - par sympathie. Si nous prenons ce phénomène acoustique par le biais de la métaphore, il est intéressant de voir comment l’acte artistique manipulant le réseau peut mettre en résonance les propriétés ubiquitaires de ce même réseau.























RELATIONS ET CONTEXTES

Les relations les plus simples à entrevoir sont les plus complexes. Il est aisé d’imaginer que le collectif est le produit du singulier. Tout comme il est aisé de penser que l’ensemble est constitué de différentes parties. Cette relation cyclique à double sens est pourtant si complexe que les travaux philosophiques, sociologiques et anthropologiques ont toujours traité cette question. Le contexte du réseau est ce qu’il y a de plus passionnant sur la question car il possède une puissance de représentation inégalable de nos jour. C’est un terrain parfait que l’on qualifie parfois de laboratoire parce qu’il est mondialement utilisé par tout type de personne et qu’il crée et recrée en permanence de nouveaux mouvements et points de vues. Vertigineux et infini, le réseaux est une somme de relations mouvantes, une foule perpétuelle.

L’art relationnel est très utile pour tenter de découvrir en quoi cet espace est singulier.

Le réseau est un nœud de relations complexes et au-delà de l'esthétique relationnelle de Nicolas Bourriaud, penser les relations dans la conception des œuvres permet de rendre visible l’expérience de la relation sociale et de ses conflits qui peuvent nous échapper au premier abord. Les drames, les difficultés que peuvent rencontrer le monde, tant de témoignages, les théories sur le monde, le bien le mal, la remise en cause. Le réseau internet porte en lui ce poids et au-delà , la technologie elle-même porte ce contexte, il faut faire preuve d’énormément de détermination pour fermer les yeux sur le contexte d’internet et ce qui le constitue désormais. Ce contexte critique permet la création de mouvements comme le Critical Engineering et l'Additivisme. Ces mouvements sont reliés par la techno-critique des acteurs et artistes qui utilisent la technologie comme matière de création et d'objet à penser. Ainsi l’avènement de technologies induit des politiques et des standardisations intégrées dans des logiques de marchés gouvernementales. Par exemple l’Additivisme est une réponse logique à l’essor de l’impression 3D comme matière créatrice dans le monde de l’art et dans l’industrie. Incitant à exploiter avec critique et subversion ces nouveaux outils. Tout comme la compréhension grandissante de la technologie par les artistes induit une certaine responsabilité (Critical Engineering) et fonde de nouvelles pratiques comme les médias tactiques²⁸.
































Incarnation.

Le mouvement empathique dans la structure centralisée se forme d’une manière linéaire et classique que l‘on retrouve depuis des siècles. L’artiste crée, le public observe. Si on raisonne en terme de relation alors, dans l’art relationnel, l’artiste crée et une relation née de cette œuvre ou bien des relations sont ajoutées à l’œuvre. Jens Haaning dans Turkish Jokes en 1994, diffuse dans l’espace public des blagues Turques à Oslo. Renversant la situation des minorités où seulement les minorités Turques comprenaient ses blagues. L’acte de retransmission crée une relation avec le public lors de sa diffusion. Yann Dumoget et ses peintures relationnelles se trouvent sur la même ligne de création. Des peintures sont créées, le public intervient librement sur les peintures avec des feutres et des stylos puis l’œuvre sera exposée. Felix Gonzales Torres et ses piles de feuilles rendaient compte du contexte qui forment l’œuvre, la dissolution de ces œuvres à mesure de la participation du public suit tout autant ce même schéma. Ce schéma sémiotique à bien entendu ses limites. Ce qui est décrit, c’est l’état en devenir de la relation, comme une conséquence qui pose le cadre d’un certain nombre de relations avec les regardeurs. Qui contraste avec l’état « d’être » des relations que l’on peut manipuler avec les données en temps réel et dans la communication technologique. Cette nuance est selon moi l’héritage de la structure décentralisée et technologique sur lequel s’appuie le réseau.

Le réseau décentralisé soutenus par le temps-réel a tendance à apporter un modèle différent. L’artiste active son dispositif et l’œuvre rend compte des relations qui sont déjà en place, elle se greffe comme témoin même si elle dispose d’artifice qui oriente le propos. C’est un déplacement des relations qui nous offre un réalisme fascinant.

L’œuvre Ecotone de l’artiste Thierry Fournier illustre bien ce schéma. Un paysage 3D se forme en temps-réel, en parallèle une voix de synthèse lit des messages depuis le réseau exprimant le désir des internautes par filtrage (« j’aimerais », « je rêve de »). Ces messages selon des critères qui échappent aux regardeurs forment le paysage.

L’œuvre et l’artiste lui-même sont dans une posture d’intermédiaire dans la relation qui est montrée.

La différence majeure est la mise en place du dispositif. L’œuvre dans ce second schéma n’est pas directrice, elle peut être détournée et modifiée, mais l’entité du réseau et son imprédictibilité lui donne sa forme. Cette posture suit selon moi l’évolution de la figure de l’artiste avec sa qualité de chercheur ainsi que l’influence des propriétés du réseau. L’art se mêle depuis des décennies à la recherche scientifique, partageant des problématiques et des questionnements. Les collectifs Critical Art Ensemble, Forensic Architecture et Bureaux d’études sont des entités représentatives d’une évolution de l’art mais aussi de l’évolution de la technologie. Les pratiques de la programmation, le Dev Art et l’hypermedia marque la dissolution des frontières entre les pratiques et forment de nouveaux champs de possibles. Ce flou permet la création de compétences tout à fait uniques. Les data-Artistes par exemple manipulent des données informatiques, des données brutes et fournissent des représentations de ces données pour permettre une lecture simple et intuitive. L’artiste de nos jours crée des algorithmes, des systèmes permettant de représenter mais aussi d’exprimer de nouvelles problématiques par l’assimilation de compétences techniques spécialisées, propres aux développeurs et aux ingénieurs. Cette évolution n’est qu’une adéquation des nouvelles problématiques de l’environnement dans lesquels nous évoluons.

Le travail de Slimane Raîs ouvre encore cette représentation schématique de la relation. L’œuvre « Pour parler » est une cabine téléphonique dans l’espace d’exposition. Lorsque l’on décroche le combiné, une ligne directe est ouverte avec l’artiste. La relation qui s’ouvre ici est le sujet même de l’œuvre. La conversation fait œuvre et réside dans la relation parfois courte où le public surpris par le dispositif va raccrocher immédiatement ou encore discuter avec l’artiste pendant de longues minutes.

Quelle est la posture de l’artiste Ben Grosser lorsqu’il crée des extensions pour un navigateur internet ? L'un de ces extensions permet de supprimer les différentes données oppressantes de Facebook (nombres d’amis, dates des différents posts, notifications). Demetricator de Ben Grosser rend flou toute cette évolution de l’œuvre d’art et de la figure de l’artiste, un programme est mis en ligne à disposition du public et l’utilisation de ce programme fait œuvre. Ce que le second schéma met en lumière c’est la place du dispositif, il peut être greffé, comme lors de l’écoute d’une conversation, ou sujet lorsque l’on discute soi-même. Le lieu où ce dispositif se déploie est aussi très important, par exemple confronter un public à des données intimes dans l’espace public forme une relation tout à fait unique. Les contextes du lieu et du dispositif sont complémentaires.

Cette schématisation qui exprime le mouvement empathique est un levier non négligeable dans l’exposition d’œuvres en réseaux. Les effets d’ubiquité permettent de rendre poreux l’espace d’exposition. Ils renvoient à des actions, des interactions et à des conséquences qui se passent dans l’espace d’exposition, sur le réseau et ailleurs. C’est l’ouverture des contextes, somme de relations, flux et reflux. L’œuvre physique apparaît comme un vecteur de relation mais surtout comme une entité par laquelle passe un flux d’activités d’une foule abstraite dont on fait partie intégrante.

La relation ainsi que le contexte sont des notions qui traverse l’art et bien au delà, le travail de l’artiste et les œuvres ne peuvent se soustraire à leurs contextes qui les a vus naître. Cette tautologie permet néanmoins de ne pas nier leurs importances.























DE L’INDIVIDU DISTRIBUÉ

Il m’apparaît que la plus grande qualité de l’artiste est d’être le vecteur de la représentation d’un monde et de ce qu’il pourrait être. Peut-être que le monde peut se définir par lui-même et que la tâche de l’artiste pourrait être de donner des points de focalisation. Et ainsi nous permettre de mieux comprendre et d’ouvrir les perceptions que l’on construit chaque jour sur ce qui compose notre environnement. L’acte romantique de la fulgurance de l’idée, la spontanéité d’un pinceau sur une toile laisse place à l’étude, à la prévision pénible et joyeuse de l’articulation d’une idée et de son sens. L’exercice de la programmation donne peu de place aux fulgurances de l’esprit tout en donnant énormément de temps à l’étude d’une pensée, la temporalité de cette pratique est extrêmement longue donnant tout le loisir de fatiguer son esprit lors de sa conception sur des détails qui sont pour la plupart non perçu par les regardeurs.

Détournement Fonctionnel.

Une des choses que permet l’hypermédia est la possibilité d’utiliser des technologies et des méthodes qui sont massivement utilisées par une industrie gigantesque. La richesse de ces outils permet le détournement de leurs fonctions sur le champs artistique. Ce déplacement permet de prendre un recul sur ce qu’est réellement cette technologie, trouver ses points de rupture et ce qu’elle peut créer en dehors d’un contexte mercantile, tout en faisant écho aux contextes dans lesquels elle est utilisée normalement. Le détournement de la fonction d’une technologie repousse alors les limites de sa propre fonction pour la concevoir dans des champs plus large. Le média Art a toujours joué sur cet enjeu avec le détournement de la télévision pour la création visuel à l’aide d’aimants par exemple²⁹. Les technologies offrent autant de nouvelles interactions, de nouveaux paradigmes pour exprimer nos nouvelles problématiques contemporaines.

De la minute de silence à la télévision de Fred Forest aux « kindleglitched » de Benjamin Gaulon, la tradition des médias tactiques résonne avec nos contextes. Pour échapper aux fonctions des objets technologiques nous pouvons nous les réapproprier. Selon des autorités économiques et publicitaires, ces objets ne doivent être que des objets ciblant une utilisation standardisée. Elle nient d’office leurs puissances poïétique pourtant si caractéristiques de notre époque. Pourtant l'art peut nous amener vers leurs limites, dans des horizons qui nous questionnent

L'oeuvre HARVEST de Julian Oliver est une éolienne fournissant de l’énergie à un ordinateur « minant »³⁰ une crypto-monnaie et reversant les fonds à des organismes luttant pour le climat. Le paradoxe que cette pièce met en lumière est une dissonance cognitive que nous vivons chaque jours. Le minage de crypto-monnaie est l’anti-thèse de l’écologisme. La valeur des crypto-monnaies est fondée sur le coût de calcul des processeurs et de l’électricité utilisé pour vérifier les transactions économiques. L’informatique utilisée ainsi que la technologie mise à profit dans cette pièce, viennent d’une longue chaîne de production perpétuelle et dévastatrice. Ce paradoxe nous coûte cher. La dissonance cognitive de vouloir changer nos comportements tout en ayant comme outils ce qui engendre nos comportements.

Dissonance Cognitive.

Il y a dans notre contexte technologique des paradoxes qu’il est difficile de résoudre, par incapacité de les entrevoir, mais surtout par impuissance. Croulant sous la complexité et l’abstraction des législations, d’enjeux qui nous sont inconnus, des strates d’interdépendances qui nous donnent une impression d’impuissance permanente. Il en découle ce qui s’esquisse comme la stratégie du « faire avec ». Dans un climat où les solutions portent en elles de nouveaux problèmes, il y a depuis quelques années, l’émergence d’une nouvelle structure informationnelle. La structure distribuée est complexe technologiquement mais d’une efficacité remarquable. Elle est défendu par une foule de sympathisant de tout bord. Le monde politique est divisé, le monde corporatiste en fait l’éloge tout comme les milieux libertaires et activistes. Cette structure porte en elle le désir de garantir l’information. Dans une époque où l’on ne peut plus se fier ni à l’image, ni aux textes, ni au sons, nous pouvons maintenant manipuler les données en temps-réel. Grâce à des bases de données, utiliser les images comme des marionnettes n'est nullement de la science-fiction, comme nous le montre le projet « Synthesizing Obama project »³¹ de l’Université de Washington.

Le système distribué est le fondement des monnaies virtuelles comme le Bitcoin, l’Ether et le Litecoin. Le réseau Tor, repose sur cette architecture. Elle est ce qu’il y a de mieux tout en étant ce qu’il y a de pire. Elle permet la libération de la parole dans des états totalitaires où la censure est omniprésente. Tout en permettant le trafic humains, la vente d’armes et la diffusion d'images pédophiles. La multiplicité des points d’un réseau sans aucune hiérarchie, crypté et intarissable, est utile mais le réseau distribué est toujours compris dans des systèmes qui sont barbares, dominant et individuels. Cette technologie est attirante par une analogie que ses acteurs font, si l’on peut garantir l’information grâce à la BlockChain³² des transactions économiques, alors nous pouvons aussi garantir nos libertés et l’ensemble des informations virtuelles. Mais la leçon de cette structure pourrait être que peu importe la structure que nous créons, les éléments qui la composent sont déterminés dans des environnements qui ne sont pas figés dans des idéologies altruistes et imperméables. Ces inventions modifient les modalités de systèmes en place, sans remettre en cause les fondements dominants. De cette manière l’activisme en ligne évolue alors qu’un des plus grands problème écologique du monde est au cœur de la technologie et de son industrie. Les « data-center » utilisent une énergie colossale, les composants informatiques reposent sur le minage des métaux rares dans des pays dominés par l’occident. Le développement de logiciels libres repose sur des matériaux totalement propriétaires où les constructeurs donnent les modalités de leurs utilisations. Des législations pour la vie privée se créent tout comme des processeurs massivement vendus dans le commerce chaque jours permettent de donner le contrôle à distance à des tiers personnes³³. L’exercice de la programmation contribue immédiatement aux problèmes écologiques ainsi qu’a l’acquiescement tacite des structures à leur origine. Des structures qui nous laissent esclave, où les corps légitiment la culture et la cultures produits les corps³⁴, où nous sommes produit et non consommateur³⁵. Les machines dans cette équation prennent une place de premier ordre mais il est pesant de constater comme Paul Lafargue nous le disait à propos d’Aristote :

« si chaque outil pouvait exécuter sans sommation, ou bien de lui-même, sa fonction propre, comme les chefs-d’œuvre de Dédale se mouvaient d’eux-mêmes, ou comme les trépieds de Vulcain se mettaient spontanément à leur travail sacré ; si, par exemple, les navettes des tisserands tissaient d’elles-mêmes, le chef d’atelier n’aurait plus besoin d’aides, ni le maître d’esclaves ». Le rêve d’Aristote est notre réalité.³⁶

Oui le rêve d’Aristote est notre réalité et nous sommes bien en concurrence avec la machine. La peur de notre asservissement à elle ne faiblit que lorsque nous parcourons des vidéos du site internet Youtube de BushCraft pour nous apprendre à faire un feu et savoir si le fruit sur l’arbre entouré de gazon synthétique à coté de notre bâtiment HLM est comestible. Pour contempler par la suite le dernier jeu à la mode qui nous permet de nous entretuer avec un réalisme attirant.

Peut-être que dans un sursaut général, le modèle World 3³⁷ ne se confirmera pas. Les mouvements empathiques peuvent être la stratégie de changements infinitésimal qui, peu importe l’avenir, pourront aider à mettre nos situations en perspective dans une coopération constructive. L’esprit de communauté va devoir devenir une composante essentielle des années à venir et les Milléniales³⁸ ont peut être un rôle dominant à jouer pour entreprendre un changement profond dans les structures ancestrales que nous connaissons. Notre époque est parsemée de colères et de révoltes dans un optimisme timide. Entrecoupé d’un confort ô combien rassurant qui nous permet d'éviter de se confronter aux fonctionnements de nos cerveaux³⁹. D'une tendance à la soumissions ancrée par l’incapacité salvatrice à concevoir nos tendres états végétatifs.

L’homme ne devient réellement homme, il ne conquiert la possibilité de son développement et de son perfectionnement intérieur qu’à la condition d’avoir rompu, dans une certaine mesure pour le moins, les chaînes d’esclave que la nature fait peser sur tous ses enfants. (…) L’homme s’est émancipé, il s’est séparé de l’animalité et s’est constitué comme homme ; il a commencé son histoire et son développement proprement humain par un acte de désobéissance et de science, c’est-à-dire par la révolte et par la pensée.⁴⁰

En attendant, nous devons faire avec. Je pense n'être que l'enfant de ma génération, l'agglomérat des influences du "nous". Et cette agglomérat, ce "nous", évolue à une vitesse sans précédente. Nous courrons chaque jours frénétiquement en espérant oublier notre aliénation. L'empathie change le monde chaque jour. Chaques générations portent en elles les espoirs d'un idéal salutaire. Si les effets d'ubiquité sont un ressort à son apparition, alors il est possible que les nouvelles structures qui nous influences portent en elles l'avênement d'une nouvelle forme d'organisation sociétale.
Notre génération comme la prochaine n'est qu'une intermédiaire et les moeurs qui nous habitent évoluent pour permettre aux mouvements empathiques de donner de nouvelles perceptions. Les architectures de nos relations sont le reflet des fondements profonds de nos communs, des moeurs et coutumes aux coeurs de nos cultures. Dans l'élan effréné de notre civilisation moderne, l'espérance reste, heureusement, une toile de fond inébranlable. les structures sont des symptômes, l'apparition de nouvelles structures distribuées évoquent de nouveaux maux, tout comme de nouvelles solutions. Leurs seules présences catalysent l'esprit contemporain pour produire les surprises de demain.


Le "Je" tente de s'effacer dans la renaissance du commun.
Le "Nous" faiblit au profit d'espaces qui lui retirent sa masse, son corps.

À "Je", pour le bonheur individualiste que j'éprouve dans l'écriture des réflexions de ce texte.
À "Nous", pour l'espérance du bien commun qui habite entre ces lignes.

























































Niemeskern Kévin. ESAAIX 2018.

Notes


1. Alexis de Tocqueville, De la démocratie en Amérique II, 1840


2. Référence au « Digital labour » domaine de recherche sur le travail Numérique.


3. Rifkin, Jeremy. Une nouvelle conscience pour un monde en crise: vers une civilisation de l’empathie. 2e ed. Montréal: Actes Sud, 2012, p. 600-601.


4. George Orwell, 1984


5. Projet de Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (n° 1697) « Dans tous les textes législatifs et réglementaires, le mot : « vidéosurveillance » est remplacé par le mot: « vidéoprotection ». ».


6. Capable de mettre en vibration, en mouvement les objets autours.


7. Amphoux, Pascal. Ubiquité et effet d’ubiquité. FAUST 96 : Rencontres pour ouvrir le XXIème siècle, "Un art de l'ubiquité", Oct 1996, Toulouse. 16 p.


8. Darwinisme Social ou Spencerisme est une doctrine politique évolutionniste


9. A Defense of the Constitution of Government of the United States of America. John Adams, 1786


10. Bosc, 2013.


11. Mouvement activiste moderne manifestant son opposition à tout ou partie du progrès technique par le "bris de machines".


12. VNS Matrix, The Cyberfeminist Manifesto for the 21st Century : 1991


13. The Computational Propaganda Project


14. Lanceur d'alerte américain, ancien agent de la CIA et de la NSA. A partir de juin 2006 il rend public des informations top secrète de ces agences à travers des médias tel que le Guardian. Il dénonce de nombreux programme de surveillance.


15. Paoli, 2008.


16. La quadrature du Net est une des principales association Française oeuvrant pour la neutralité du Net et la liberté du réseau Internet.


17. Critical Art Ensemble, Utopian Promises—Net Realities


18. Idéologie californienne est une théorie des médias de Richard Barbrook affirmant l’hybridation paradoxale de l’héritage des gourou des années 60 comme Timothy Leary et de la droite politique.


19. Adam Greenfield, Everyware.

20. Ted Nelson, Computers for Cynics 0 - The Myth of Technology


21. S.Raymond, La cathédrale et le bazaar.


22. Groupes de chercheurs, professeurs, intellectuels travaillant autours des technologies de cryptage.


23. Lanceur d’alerte et Créateur du site internet WikiLeaks.


24. Principal créateur du projet Tor, informatitien et expert en sécurité informatique.


25. Promesse du cyber espace, avènement d'une nouvelle conscience pour l'espèce humaine.


26. Le projet Tor est un navigateur de page Web permettant de naviguer sur un sous-réseau appelé « DeepWeb »


27. La « BlockChain » est l’espace virtuel où transite des blocs de transaction économique ou d’information sur un réseaux crypté. L’ensemble des utilisateurs vérifie en permanence ces données pour les valider.


28. Forme d'activisme dans les médias par le détournement et l'intervention. Les médias tactiques critiquent l'ordre social ou économique dominant.


29. Nam June Paik, Magnet TV, 1965.


30. Le verbe miner est utilisé dans le jargon des initiés pour parler de la verification des transactions sur la BlockChain.


31. en Anglais « Lyp-Sync » (synchronisation des lèvres), est une technologie permettant de cibler et modifier en temps-réel le visage, les lèvres d’une personne. Les filtres photos / vidéos sur différentes applications mobiles utilisant cette technologie sont très à la mode depuis plusieurs années.


32. La « BlockChain » est l’espace virtuel où transite des blocs de transaction économique ou d’information sur un réseaux crypté. L’ensemble des utilisateurs vérifie en permanence ces données pour les valider.


33. Depuis 2008 l’ensemble des processeurs Intel possèdent un système d’exploitation dérivé de « Minix ». Ce système permet l’accès à distance de tiers, le changement ou l’écoute des données qui transitent sur la mémoire RAM. Il est au niveau -3, c’est à dire à trois niveaux de contrôle plus bas que le système d’exploitation des utilisateurs lambda (Windows, Mac OS, Linux).


34. Pierre Bourdieu, La domination masculine.


35. « Si c’est gratuit c’est que vous êtes le produit », dictons résumant les nouvelles économies sur internet proposant les données de ces utilisateurs pour l’étude statistique dans la publicité ciblée.


36. Lafarge, Paul. Le Droit à la paresse: réfutation du droit au travail de 1848 (1883), Castelnau-le-Lez: Climats, 1994, p.74


37. Le modèle World 3, est un modèle de simulation informatique créé dans les années 1970. Il suit avec une similarité terrifiante les mêmes courbes de population, production industrielle. Le problème étant qu’il culmine sur une courbe exponentielle et que nous somme en haut de cette courbe. La chute de la population mondiale de 3 milliards d’individus sur 60 ans n’est pas un scénario réjouissant si ce modèle continue de se confirmer.


38. Les " milléniales " désignent les personnes nées dans les années 1990 et 2000. Digital Native.


39. Timotey Leary, How to operate your brain ?


40. Michel Bakounine, Théorie générale de la révolution (1868-1872).

MEDIAGRAPHIE :

Livres :


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Bosc, Serge. Stratification et classes sociales: la société française en mutation. 7e ed. Paris: Armand Colin, 2013, 216 p.

Bourriaud, Nicolas. Esthétique relationnelle. Dijon: Presses du réel, 1998, 122 p.

Debord, Guy. La société du spectacle (1967). 3e ed. Paris: Gallimard, 1992, 208 p.

Deleuze, Gilles ; Gattari, Félix. Capitalisme et et schizophrénie : Mille plateaux. t2. Paris: Éditions de minuit, 1980, 645 p.

Greenfield, Adam. Everyware: the dawning age of ubiquitous computing. Berkeley: New Riders, 2010, 272 p.

Himanen, Pikka ; Torvalds, Linus; Manuel Castells. L’éthique hacker et l’esprit de l’ère de l’information. Paris: Exils, 2001, 226 p.

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Wilson, Stephen. Information Arts: Intersections of Art, Science and Technology. Cambridge: MIT Press, 2002, 969 p.

Vidéos :


Azam, Olivier; Mermet, Daniel. Chomsky et Cie,[DVD], Paris:Les Mutins de Pangée, 2008, 112min.

Bayart, Benjamin. Internet libre, ou Minitel 2.0 ? [vidéo en ligne]. Amiens: FDN, 2007, 64min. Repéré à https://www.youtube.com/watch?v=AoRGoQ76PK8

Bergère, Sylvain. Une contre-histoire de l’Internet [Vidéo en ligne]. Paris: Premières lignes Télévision, 2013, 88min. Repéré à https://boutique.arte.tv/detail/contre_histoire_internet

Boutang, Pierre-André. L’Abécédaire de Gilles Deleuze, ,[DVD], Paris: Editions Montparnasse, 1996, 453min.

Curtis, Adam. Hypernomarlisation [DVD]. Londres: British Broadcasting Corporation, 2016, 166 min.

Denny, Simon. Technology and the Disruption of Governance [vidéo en ligne] Miami: ICA Miami, 2018, 62min. Repéré à
https://www.icamiami.org/channel/simon-denny-technology-and-the-disruption-of-governance/

Nelson, Ted. Computers for Cynics 0 - The Myth of Technology [vidéo en ligne]. 14min. Repéré à https://www.youtube.com/watch?v=KdnGPQaICjk

Paoli, Stéphane. Paul Virilio : Penser la vitesse [vidéo en ligne]. La Générale de Production / Arte France, 2008, 90min. Repéré à http://www.apar.tv/tv/paul-virilio-penser-la-vitesse-documentaire-a-voir-ici-en-integralite/

Articles :


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Critical Art Ensemble. « Appendix: Utopian Promises—Net Realities ». Interface 3, 1995, p.139-155. http://critical-art.net/books/flesh/flesh7.pdf. Consulté le 07/05/20017.

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Œuvre d’art :


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